Cettre lettre a été publiée dans le numéro 100 de la revue Moebius. Lettre inutile à Monsieur Christian Bobin. Peu de livres changent une vie. Quand ils la changent, c’est pour toujours. La plus que vive . Monsieur Bobin, Ce matin, j’ai couru après mes mots que je ne trouvais plus. Harcelée, j’étais harcelée de mots. Je les ai cherchés partout. Feuillette et feuillette, ici, là, constante, fébrile, à la folie. Enfin, ils sont là, dans votre livre « Autoportrait au radiateur » que je relis. À même vos pages, à l’orée de vos mots j’écris : De minuscules feuilles de chêne frissonnent. Il me semble les voir pour la première fois. Des chênettes brillantes, diaphanes, fripées, veinées comme la peau d’un nouveau-né. Des soupirs me viennent comme si l’enfant avait trop longtemps pleuré. J’écris n’importe où, n’importe quand, au moment le plus inattendu. Imaginez des mots qui me pressent, qu’il faut absolument que j’écrive. Ils me viennent
« j'étais seul en haut de l'escalier j'avais six ans j'espérais que le jour allait tout remettre debout » « j'agite quelques fragments de vie » « je fouille les phrases et les apparences je m'assieds au bord de moi m'enracine dans ce regard » « la solitude est une auberge où personne ne s'arrête »
Comme le dit Beigbeder en parlant de son nouveau livre un barrage contre l'Atlantique : Jean-Christophe Laurence de la Pesse l'interroge: « Parlant de phrases : celles du livre sont très courtes et très espacées, passant parfois sans logique apparente d’une idée à une autre. Pourquoi avoir opté pour cette forme ? J’avais une impuissance à écrire, donc j’avais décidé d’écrire seulement une phrase par jour. J’ai fait ça un temps, puis c’est devenu deux phrases, puis un flot continu. Cette forme a permis de débloquer… J’ai toujours bien aimé les formules et là, je trouvais ça marrant de les exposer davantage dans un récit qui s’organise avec des phrases où chaque idée en entraîne une autre. Exactement comme ça se passe dans le cerveau humain. On a des pensées qui se bousculent en permanence dans notre tête. C’est amusant de créer cet effet de foutoir qui est organisé à notre insu. » Piste à suivre : une phrase par jour et on verra où tout cela nous mène. Si je pouvais voir la mer
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